Dieu vous garde d'un homme qui n'a qu'une affaire
Ce proverbe vous engage à vous défier de certaines gens qui craignent de ne jamais assez bien faire, et qui par cet excès même gâtent tout ce qu'ils font.
Le trop d'expédient peut gâter une affaire;
On perd du temps au choix, on tente, on veut tout faire :
N'en ayons qu'un, mais qu'il soit bon.
(LA FONTAINE)
Un sot veut toujours parler de son métier, parce qu'ordinairement il en est si occupé qu'il en fatigue tout le monde. L'homme sage s'occupe de son affaire sans en importuner personne. On n'est presque jamais trop fortement occupé d'un seul objet sans une disette d'idées. Cependant tout le monde se ressent des habitudes de sa profession. Le marchand ne parle pas de commerce sans parler d'intérêts, de profits; le banquier, d'escompte, d'agio; l'agent de change, de hausse, de baisse, du prix des effets et des actions; l'homme d'épée, de prouesses, de gloire et d'honneur; l'homme de robe, de lois, de procès, d'espèces, de considérants, de gloses, de commentaires. S'agit-il de maximes d'état, de principes de morale, d'axiomes généraux, chacun les applique à son état. Il en est de même d'un art, d'une science. On reconnaît l'homme à son langage habituel. Il tire presque toujours toutes les comparaisons de la vie des rapports de son état. Un peintre qui parlera de voyages, comparera les mœurs d'un peuple aux couleurs d'un tableau; un architecte, en parlant d'histoire, comparera la disposition d'une armée rangée en bataille à celle d'un édifice : de sorte que toutes les pensées et les paroles d'un individu, prennent une teinte et des nuances naturellement assorties à sa profession.
Navita de ventis, de bobus narrat arator ;
Enumerat miles vulnera, pastor ovos
(Properce)
« Le marin parle des vents, le laboureur de ses bœufs ; le soldat compte ses blessures, et le berger ses brebis. »
HISTOIRE GÉNÉRALE DES PROVERBES T1 C. De Méry 1828
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